Deuxième texte de l’écrivaine en résidence

J’ai demandé à trois danseuses-chorégraphes et trois poètes de me proposer une piste d’improvisation, une question de corps liée à la lecture ou l’écriture; et/ou une citation qu’elles aiment, qui touche à ces sujets; et/ou une partie du corps que tu voudrais que j’investisse en impro et te dédies.

 

 Aujourd’hui :

Citations

I close my eyes and I see her close her eyes and she sees you.
sarah kane, Crave.

 

I say what I see
This is my power
ariana reines, A Sand Book.

 

Je sens, par mon silence, le creux de ma bouche.
pierre fédida, L’absence.

 

Le texte est toujours écrit par une lecture.
pierre fédida, L’absence.

 

Partie du corps; dédicace.

La fourchette sternale.

Temps : 3 minutes

 

Piste proposée par Annie Lafleur s’intéresse à la métamorphose du corps féminin et aux possibilités poétiques d’une langue elle-même en constante mutation. La poète poursuit son travail de recherche d’une langue poétique riche et composite, nourrie du lexique de plusieurs disciplines, qui cherche à allier vitesse et densité, images et rythme, étrangeté et plasticité. Avec Puberté (2023), Lafleur clôt un cycle d’écriture entamé avec Rosebud (2013) et poursuivi avec Bec-de-lièvre (2016) et Ciguë (2019), cycle porté par la nécessité de déployer une langue qui émule l’imaginaire du corps et célèbre ses pulsions de vie et de mort, sa violence désirante, ses devenirs.

 

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J’arrive en retard à la lecture – je crois que la montre au bracelet trop grand que j’ai emprunté prend du retard.

J’ai une nouvelle minuterie qui fait tic tac. Je ne sais pas si elle représente une poule ou un coq.

Antoine est encore au piano. Il joue aujourd’hui quand je lis.

La scène est chargée d’objets qui ne servent pas – deux larges fauteuils rouges, un guéridon au plateau de verre et aux pieds de métal noir, quatre ou cinq micros repliés côté jardin, le piano et Antoine, le micro au centre, et une boîte de plastique – pour les lunchs? – avec quelque chose de rouge dessous qui me fait penser à une carte de St-Valentin faite par un enfant.

 

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Réécriture souvenir, à partir de l’impro

Texte #2 – Voir vertiges

 

Je vois
le vertige au creux de la bouche
le vertige de nos silences.

 

Je vois
des fils rouges
ni lèvres qui scellent ou baisent
ni langues ni fils de sutures
et broderies.

 

Je vois
derrière nos yeux
nos rêves paupières ouvertes
ce qui git derrière nos globes ravalé
ce qui dort de ne pas encore avoir été
pensé pas encore né ni dit.

 

Je vois
devant des corps flottants
ces fantômes que moi que moi
qui les voient

 

calligraphie de mouches à feu
des graffitis flottants à mes visions cornées
et je dis
ce que je vois :

deux chaises

un mur une question

le souvenir d’un sourire

 

et le temps qu’il prend à paraître
des yeux aux lèvres et mes yeux tournent sur la ligne d’horizon

 

je vois autour de ma colonne ma tête lentement gyre
vertige de la torsion je vois derrière mon cœur
le caché le tu le bouclier ce qui se tait
tapi derrière l’écu d’os la carapace
qui ne cède rien et ses griffes
ses dents des fils
des frontières
qui tracent
la cage
à dissoudre
et deux côtes
flottantes fantôme
que moi que moi et elles
libres et détachées.

 

Je vois

 

te cassera
le cœur jusqu’à
ce qu’il reste ouvert

 

et dans
ma bouche
le mot puissance

 

je vois lové dans le silence

 

mes amies lovées au cœur
cassé

 

au cœur cassé ouvert
à force vivre
je vois
qu’elles voient elle volent.

 

«I close my eyes and I see her close her eyes and she sees you»

-Sarah Kane

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